En fin de matinée j'ouvre ma boite à lettres. Les sempiternelles brochures publicitaires manquent de me mettre de mauvaise humeur. Sitôt identifiées elles sont jetées dans la poubelles du bout de mes doigts méprisants. Par dessous cette engeance, quelques enveloppes blanches contenant probablement des factures. Mais aujourd'hui, gît au fond de la boite, la plus belle des surprises : une carte postale. Le hall de l'immeuble s'illumine. Une personne de ma connaissance, en voyage quelque part dans le monde, a eu une pensée pour moi. Je la prends sans la regarder, il faut faire durer le plaisir. Je ne résiste pas longtemps. Je contemple la photo, j'essaye d'en deviner la provenance, ce qui n'est pas toujours simple. Souvent c'est écrit dessus mais ce n'est pas systématique. Parfois j'ai été prévenu de l'envoi de la précieuse missive. D'autres fois encore, rien ne laisse deviner l'origine du petit morceau de carton et encore moins de son auteur. Il faut alors la retourner. En bas, la signature de l'expéditeur qui se trouve être immédiatement promu au rang de personne la plus formidable que j'ai jamais rencontrée. Les quelques mots ordinaires jetés machinalement sur la carte ont finalement peu d'importance. Je la tourne et la retourne, je la caresse, je regarde chaque détail de la photo, j'examine le cachet, je calcule le temps qu'elle a mis pour traverser l'océan. Puis elle rejoint ma collection car, plus précieuse qu'une émeraude, une carte postale se conserve ad vitam aeternam. C'est un petit bonheur anodin mais irremplaçable.
